Max Dominique

Max Dominique

Port-au-Prince, 2004

Né à Port-au-Prince, le 24 avril 1940, Max Dominique est un enseignant, prêtre et critique littéraire haïtien. Il fait des études de théologie à Rome, en Italie, et de Lettres à Paris et à Strasbourg, en France. Prêtre de la Congrégation des Pères du Saint-Esprit, il enseigne au Petit Séminaire Collège Saint Martial et devient par la suite son directeur.

Le 15 août 1969, le régime dictatorial de François Duvalier le déporte en compagnie de huit autres prêtres haïtiens de l’Église catholique romaine, dont le feu Père Antoine Adrien et un laïc. Il enseigne en République Centrafricaine. Par la suite, il séjourne au Canada où il participe en 1973 aux côtés de Paul Déjean et Karl Lévêque à la fondation du Bureau de la Communauté chrétienne des Haïtiens de Montréal. Il part aux îles Bahamas et se consacre à l’animation pastorale des Communautés haïtiennes.

En 1986, il retourne en Haïti et devient responsable d’une paroisse dans la Plaine de l’Artibonite (au nord de la capitale), où il a véhiculé les idées directrices de la Théologie de la Libération dominante en Amérique latine. Dès lors, il s’engage dans la lutte pour l’instauration de la démocratie en Haïti, aux côtés d’autres prêtres de l’église catholique romaine et de militants de gauche, qui supportent la candidature du père Jean Bertrand Aristide, aux premières élections présidentielles démocratiques du 16 décembre 1990. Par la suite, il rompt, à la fin des années 1990, ses relations avec la mouvance Lavalas qui s’engage dans des pratiques antidémocratiques, des violations de droits humains et d’autres crimes commis par ce régime durant le retour au pouvoir de Jean-Bertrand Aristide.

Membre actif du mouvement de rénovation du Petit Séminaire Collège Saint-Martial, en 1992, on le retrouve à la tête de la Congrégation du Saint-Esprit. En 2000, il occupe la chaire Littérature contemporaine et Critique littéraire à l’École Normale supérieure (ENS). Critique littéraire, lecteur de Faulkner, Saint-Augustin, Baudelaire, Rimbaud, Verlaine, Goethe, Lezama Lima, Vilaire, Brierre, Ollivier, Frankétienne, Novalis, Proust et García Márquez, il initie ses étudiants à la critique textuelle et à la lecture des grands auteurs latino-américains. Il collabore au quotidien Le Nouvelliste et à plusieurs revues sous le pseudonyme d’Alain Ramire et Gil Martinez dont Frères du Monde, Nouvelle Optique, Collectif Paroles, Conjonction, Sèl, Maintenant et Chemins Critiques.

Max Dominique est une référence incontournable, voire indépassable, dans la critique littéraire en Haïti. Il y a dans sa personnalité une hauteur naturelle, une curiosité et une sensibilité recherchées envers le texte littéraire. L’homme est d’une grande culture. Sa critique témoigne d’un travail minutieux d’un savant qui combine l’esthétique, le poétique pour produire, créer à partir de la création des autres, donner vie, à travers des nuances, à ces œuvres auxquelles il donne un corps, une âme dans son explication de l’expérience et des vérités du monde. Il a l’esprit critique toujours en éveil, lui qui, dans l’un de ses cours à l’ENS à souligner que tout critique littéraire doit cultiver chez lui la curiosité et la sensibilité, le sens critique, l’abstraction et le sens de l’analyse.

Rigoureux, exigeant, pointu et pointilleux, Max est un critique d’exception. Sa lecture des œuvres étudiées dans les seuls deux volumes sur la littérature haïtienne est d’une originalité et d’une nouveauté exemplaires. Avant lui, la critique littéraire, on peut le voir par dans les réflexions produites dans les anciens manuels ou critiques sur la littérature, s’enlisait dans une histoire de pastiche et n’offrait rien de neuf sur les auteurs et les textes mille fois revisités. C’est avec raison que Pierre-Raymond Dumas écrit, à propos de L’arme de la critique littéraire, dans son Panorama de la littérature haïtienne de la diaspora que :

Parmi tous les commentaires qu’a suscités l’expérience de l’exil, parmi toutes les critiques, exhaustives ou partielles, dont l’ensemble écrasant devrait suffire à pulvériser le dérisoire, vaine et paresseuse entreprise de ressassement que tentent, contre toute évidence, un tas de spécialistes en littérature haïtienne, il est un livre qui les dépasse tous. […]. Je ne me souviens pas d’un seul article de critique littéraire depuis cinq ou dix ans qui puisse se mesurer aux quatorze essais rassemblés dans L’arme de la critique littéraire de Max, ouvrage dense et tendu.

De son côté, l’éditeur montréalais Rodney Saint-Éloi a fait la remarque que voici :

[Max Dominique] a systématisé la critique littéraire chez nous, en apportant de précieux éclairages sur tous les grands courants esthétiques du XXe siècle avec son premier livre : L’arme de la critique littéraire : Littérature et idéologie (CIDIHCA, 1988). Avec Max, il y a toujours lieu de débat. On parlait soit littérature, soit théorie littéraire. Le reste était un grand rire fraternel.

Critique littéraire majeur du XXe siècle haïtien, Max a le mérite d’avoir introduit un discours neuf, en opposition à la critique traditionnelle, mettant en avant des approches basées tant sur la sociocritique que sur l’analyse textuelle et la sensibilité éloquente.

Max Dominique décède à Port-au-Prince le 17 septembre 2005 à l’âge de 65 ans des suites de complications dues à une cirrhose du foie.

– Dieulermesson Petit Frère


Oeuvres principales:

Essais:

  • L’arme de la critique littéraire. Littérature et idéologie. Montréal: CIDIHCA, 1988.
  • Esquisses critiques. Port-au-Prince: Mémoire, 1999.

Textes critiques publiés dans des revues:

  • Ramire, Alain [pseud. de Max Dominique]. « Pour une culture populaire haïtienne ». Frères du monde 43-44 (1968): 57-70.
  • « Littérature engagée ou désengagement de la littérature. Les tensions essentielles de la littérature haïtienne ». Maintenant 96 (mai 1970): 161-163.
  • « Révolution et langage chez les romanciers haïtiens ». Frères du monde 64 (1970): 109-118.
  • « Idéologie et subversion chez les poètes de La Ronde ». Nouvelle Optique (janvier-mars 1972): 143-161.
  • « Vodou ak literati ayisien ». Sèl 6.41 (Brooklyn, août 1978): 26-31.
  • « Bamboola Bamboche ou le temps de la dérision » et « Questionner Dezafi ».  Conjonction 169 (juin 1980): 15-25; 27-37.
  • « Yon mòd rezistans devan okipasyon ameriken an, nan literati ayisien ». Sèl 61-62 (Brooklyn, septembre 1984): 17-23 et 56.
  • « Itinéraire thématique de Jean Brierre ». Collectif Paroles 29-30 (novembre-décembre 1984): 38-44.
  • « Castera : Critique et Poésie ». Conjonction 180 (1988): 79-109.
  • « L’écriture baroque d’Ollivier et la crise des idéologies ». Chemins Critiques 1.3. (décembre 1989): 189-211.
  • « Haïti littéraire : positions et propositions ». Notre Librairie 133 (janvier-avril 1998):
  • « Du conte et de l’audience ». Boutures 2.1 (2001): 37-40 (voir lien ci-dessous).
  • « Jean Brierre », « Edmond Laforest » et « Vastitudes vilairiennes ». Conjonction 210 (2004) : 17-18; 19-20; 27-34.
  • « Lire et danser Nedgé de Roussan Camille ». Collectif, Relire l’histoire et le littéraire haïtiens. Port-au-Prince: Presses nationales d’Haïti, 2007: 87-100.
  • « Héroïnes de Marie Chauvet ». Legs et Littérature 8 (juillet-décembre 2016): 73-89.

Liens:

sur Île en île et dans Boutures:

ailleurs sur le web:

archives de Radio-Haïti Inter (audio):

  • icon_audio « Entre Nous » : Max Dominique « L’arme de la critique littéraire » (première partiedeuxième partie) (8 janvier 1989), 24:09 et 24:54 minutes.
  • icon_audio « Face à l’Opinion » : « Le père Max Dominique au sujet de la théologie de la libération » (première partiedeuxième partie) (14 août 1995), 46:33 et 33:43 minutes.
  • icon_audio « Face à l’Opinion » : « Le père Max Dominique sur la crise des valeurs » (première partiedeuxième partie) (9 juillet 1997), 45:52 et 22:38 minutes.

Retour:

Dossier Max Dominique préparé par Dieulermesson Petit Frère

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mis en ligne : 30 décembre 2020 ; mis à jour : 3 janvier 2021