Yusuf Kadel, 5 Questions pour Île en île


Le poète et dramaturge Yusuf Kadel répond aux 5 Questions pour Île en île, à Beau-Bassin (Île Maurice), le 19 juin 2009.

Entretien de 18 minutes réalisé par Thomas C. Spear.
Caméra : Anjanita Mahadoo.

Notes de transcription (ci-dessous) : Gilbert Sotomayor.

Dossier présentant l’auteur sur Île en île : Yusuf Kadel.

début – Mes influences
02:53 – Mon quartier
05:18 – Mon enfance
08:22 – Mon oeuvre
12:20 – L’insularité


Mes influences

Des influences, « Il y en a toujours, conscientes et inconscientes… »

Parmi les auteurs mauriciens :

… Jean-Claude d’Avoine (La Cité fondamentale), parmi les auteurs mauriciens, pas très connu à Maurice et « quasiment inconnu à l’étranger », pour l’ampleur de ses propos et pour la dimension ésotérique et énigmatique de son oeuvre,

… Raymond Chasle, fondateur avec d’Avoine de la revue L’Étoile et la Clef en Belgique, pour ses audaces formelles,

… l’incontournable Malcolm de Chazal, qui savait si bien dire la face cachée des choses.

Parmi les poètes étrangers :

… Arthur Rimbaud pour sa vision et sa lucidité,

… Charles Baudelaire pour sa passion,

Plus près de nous : Boris Vian, Raymond Queneau, Jacques Prévert, pour leur esprit et leur impertinence.

La bande des quatre surréalistes : Breton, Aragon, Éluard et Tzara.

Et les grands maîtres de la poésie traditionnelle japonaise, les haïkus (Kobayashi Issa, Onitsura, le moine Ryokan) et des poètes sufis tels que Yunus Emré et Djalal Ud Din Rumi.

Mon quartier

« C’est un quartier auquel je suis très attaché pour deux raisons : j’ai passé presque toute ma vie dans ce quartier [sur la route Royale à Beau-Bassin …] et je suis un vrai citadin. »

Kadel décrit son quartier comme étant plutôt vivant, bruyant, esthétiquement pas le meilleur du monde, mais il y a pire. Les hauts lieux d’enfance sont les « tabagies », pour acheter des pâtisseries et friandises, jouer au babyfoot et prendre un verre de thé avec les amis.

Les bruits de la ville lui sont indispensables. Vacances à l’île Rodrigues ? Havre de tranquillité, de sérénité et de paix. Au début, le paradis. Très vite, les klaxons, les voix lui manquent.

Mon enfance

« Comme beaucoup de Mauriciens, mon grand-père était envoyé en Égypte … et a participé aux offensives de Montgomery contre le Field Marshal Rommel ».

À l’âge de neuf ou dix ans, il découvre des documents de son grand-père paternel, un homme qui s’était engagé dans l’armée britannique en 1940. La découverte de ces lettres et photos du grand-père – dont la vie d’aventurier est aux antipodes à la sienne – renforce sa passion pour l’histoire et lui donne envie d’écrire.

Mon œuvre

« La poésie est un langage qui s’adresse non pas à l’intellect (« faculté de comprendre ») mais à l’imaginaire. »

Stimuler l’imaginaire par quelque émotion, vision, conception… de l’humain et du divin, de l’être et de l’univers, que l’on trouve depuis le premier recueil de poèmes de Kadel, Surenchairs, jusqu’au dernier, Soluble dans l’œil. Le monde est soluble pour le poète qui peut le dissoudre, le voir comme il le ressent. Appréhender ce qui nous échappe, conjurer la peur de ce monde si vaste et mystérieux.

« La pièce de théâtre est un miroir que le dramaturge tend à ses semblables. »

Interroger, interpeller, questionner. Laisser au lecteur ou au spectateur la liberté d’y apporter sa propre réponse. La première pièce de Kadel date de 1998, Un Septembre Noir. La dernière, Minuit, est publiée en 2009 dans la revue l’Atelier d’écriture.

L’Insularité

« Je suis né sur une île, j’ai passé pratiquement toute ma vie sur une île, je vis actuellement sur une île, donc par définition, je suis un insulaire. »

Qu’est-ce qui caractérise l’insularité, un insulaire ? Selon Kadel, c’est un certain sentiment d’enfermement, d’exiguïté. Intellectuellement, il ne s’est jamais senti à l’étroit, puisqu’il a toujours connu des passerelles d’ouverture au monde (bibliothèque, radio, télévision, cinéma). Physiquement, pourtant, il peut se sentir à Maurice comme un lion en cage. Sur une île multiculturelle, multiethnique et multiraciale, cette exiguïté est propice à la tolérance. Avec pratiquement toutes les religions et races du monde réunies sur un territoire d’à peine 2000 kilomètres carrés, les Mauriciens sont amenés fatalement à se faire des concessions, à être tolérants. Le sentiment d’enfermement favorise également l’ouverture vers le monde. Les Mauriciens aiment voyager, partout, ils aiment le monde, explorer l’ailleurs.


Yusuf Kadel

Kadel, Yusuf. « 5 Questions pour Île en île ».
Entretien, Beau-Bassin (2009). 18 minutes. Île en île.

Mise en ligne sur YouTube : 10 mai 2013.
(Cette vidéo était également disponible sur Dailymotion, du 7 décembre 2009 jusqu’au 13 octobre 2018.)
Entretien réalisé par Thomas C. Spear.
Caméra : Anjanita Mahadoo.
Notes de transcription : Gilbert Sotomayor.

© 2009 Île en île


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mis en ligne : 7 décembre 2009 ; mis à jour : 26 octobre 2020