pour Marie Chauvet, « Que meure la chanson de la mort »

Dans ton secret il souffle un air de cendre
et c’est la nuit qui vient à pas de pluie
avec ses bras perdus de légendes muettes
avec ses yeux perdus de départs repentis
C’est la nuit… Et toi qu’en dis-tu
Nous ne chanterons plus sur ces notes aveugles
et nous irons la plume aux doigts

Sur l’élan de ta voix glissent nos vies
vers l’aurore et la nuit et le sel de la mer
Le rameau s’envole et c’est toi qui rêves Marie
de danses tristes et de glaçons dans nos cœurs
dans nos mémoires vendues
Et c’est toi Marie… Nous ferons le cadavre exquis
Tant pis pour l’heure la poésie dans nos yeux

Dans la coupure de ta paume
tu retrouveras loin de nous la couleur de nos cœurs
et les mots qui disent toute la pensée des rayons
Marie !… c’est au-dessus des tours qu’on se voit
Les doigts liés les bras autour de la moisson
arrière tous nos serpents coupés
arrière et que meure la chanson de la mort
dans l’asphyxie de l’espace nos cœurs tremblant de trop de rêves

Et qui parlait de la légende de Villard
songeait que toi tu fus cette légende chère à nous autres
ô toi si pleine de légende de fumée et d’alcool
ce sera entre nous neige et silence neige et silence
quand tes pas s’élèveront vers le bleu

Ce sont Serge Roland Villard René et Thony
et toute la semaille des étoiles
mais l’hirondelle a passé aux lèvres un ciel entier
et tu disais nos serments étouffés
notre angoisse la corde au cou

Et pourtant nous avons conquis l’arc-en-ciel
dans tes cheveux de nuit

Bourdon, 1er août 1963


Ce poème, « Que meure la chanson de la mort », a été écrit collectivement, pour la romancière Marie Chauvet, par les cinq membres de Haïti Littéraire : Davertige (Villard Denis), Roland Morisseau, Serge Legagneur, Anthony Phelps et René Philoctète. Il est offert aux lecteurs d’Île en île en 2005 par Anthony Phelps.

© 1963 Haïti Littéraire


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mis en ligne : 6 mai 2005 ; mis à jour : 10 octobre 2021