Maryvette Balcou, 5 Questions pour Île en île


Chercheure en éducation, romancière, nouvelliste et auteure de nombreux ouvrages pour la jeunesse, Maryvette Balcou répond aux 5 Questions pour Île en île.

Entretien de 30 minutes réalisé par Thomas C. Spear à Saint-Denis (Île de La Réunion) le 2 juillet 2009.

Notes de transcription (ci-dessous) : Coutechève Lavoie Aupont.

Dossier présentant l’auteure sur Île en île : Maryvette Balcou.

début – Mes influences
03:14 – Mon quartier
06:40 – Mon enfance
11:29 – Mon oeuvre
25:41 – L’insularité


Mes influences

Dans les auteurs qui ont pu marquer mon parcours d’écriture, il y a notamment Sylvie Germain, une auteure que j’ai particulièrement appréciée, sans doute parce que c’est quelqu’un qui explore la relation entre l’homme et la nature, avec des excès et des manques. Parfois son travail a une dimension sociologique, littéraire aussi, bien sûr. Elle procède à de très belles extrapolations. En fait, elle pousse à l’excès certains personnages qui relèvent de l’impossible en même temps qu’ils ressemblent à la réalité. C’est une écriture très soignée, très fouillée. On sent la tension de l’auteure sur la ponctuation, sur chaque mot, sur la musique des phrases. Tout cela a effectivement influencé mon parcours d’écriture.

Du côté des scénarios, Laurent Gaudé me paraît très fort du point de vue de la structuration de ses romans. J’ai eu beaucoup de bonheur à lire ses textes. D’un bout à l’autre, c’est le genre de texte dont j’aimerais être l’auteure. Sinon, dans le domaine du théâtre, il y a plein de personnes qui m’ont marquée. Entre autres, Pippo Delbono, un artiste italien qui a su mettre en scène des dimensions universelles de la société, avec des personnages à la fois un peu fous et tellement vrais. Le côté dramaturgique de son travail est fascinant et impressionnant : c’est tellement réussi, c’est fouillé, c’est extraordinaire ! Cela sort du commun. Il y a peu d’auteurs de ce type-là ! J’aime beaucoup ceux qui vont loin dans la recherche des scénarios, dans la recherche de la perfection dans l’écriture. J’essaie de tendre vers tout cela.

Mon quartier

J’habite à Saint-Denis, plus précisément sur la colline des Camélias. Je suis aussi dans une allée, qui s’appelle l’Allée des Myosotis. Ainsi, c’est tout en fleurs ! Mon quartier est un quartier résidentiel avec un calme très favorable à l’écriture. Je crois que je n’arriverais pas à vivre dans un quartier bruyant. Le calme est un atout majeur. L’autre atout, c’est que j’ai une vue très dégagée. Je n’aime pas les endroits dans lesquels je me sens enfermée. Je suis née au bord de la mer et j’ai toujours regardé l’horizon avec fascination, parce que c’est l’endroit où l’on peut aller, cela ouvre sur un ailleurs, sur ce que l’on ne connaît pas. De chez moi, je vois les avions qui arrivent et ceux qui partent. Je les entends aussi. Tout cela est une part de moi, une part de voyage que j’ai toujours aimée. Voilà : le calme, les avions, la mer, et les bateaux, à l’occasion. Je ne les vois pas de très près, mais cela suffit pour sentir leur présence. Dans mon quartier, il y a aussi des êtres humains que j’observe, que j’écoute, que je regarde fonctionner et qui sont parfois d’excellentes sources d’inspiration pour le travail d’écriture. Parce que, bien évidemment, il n’y a pas que son propre parcours qui peut être prétexte à l’écriture. Tout ce qui relève des histoires des autres, de ce qu’ils font, de ce qu’ils préfèrent, de ce qu’ils mettent en avant, de ce qu’ils ne font pas… Tout cela est un point de départ possible pour l’écriture.

Je suis un peu sur les hauteurs. Les hauteurs donnent cette vue dégagée sur le départ, sur La Réunion aussi, sur le monde d’en bas. Avec la ville de Saint-Denis un peu bruyante en dessous, mais une ville qui néanmoins s’améliore de plus en plus. La ville a beaucoup changé depuis que je suis arrivée à La Réunion : des quartiers qui changent, des rénovations de toutes parts, des routes aussi et, bien sûr, beaucoup de voitures. C’est un problème !

Voilà à peu près l’univers dans lequel je suis. Le soir, on ne voit pas le soleil qui se couche sur Saint-Denis. C’est bien dommage. Il faut que j’aille sur l’ouest pour cela. Sinon, le climat dont je bénéficie est plutôt très agréable.

Mon enfance

J’ai eu une enfance heureuse. Je suis née dans une famille de six enfants en Bretagne. Tout près de la mer, dans la nature aussi. J’étais très entourée par mes frères : deux frères nés avant moi, deux autres après, et une sœur en dernière position. J’ai beaucoup bougé. J’ai des souvenirs d’avoir beaucoup joué avec mes frères, à l’extérieur, d’avoir beaucoup créé avec eux. Je n’étais pas dans le monde des poupées, parce que j’ai été pendant longtemps seule fille parmi quatre garçons. Ce qui me plaisait, c’était d’aller jouer dans les rivières, de trouver des salamandres, de faire des barrages, de créer des poussettes avec des roues récupérées… Ou parfois, descendre les côtes sans freins avec des vélos. C’était assez intrépide, pas très reposant. Peut-être pas très reposant, particulièrement pour ma mère, parce que je pense qu’elle attendait de moi que je sois une fille un peu plus conforme à son idéal de fille. Quand j’étais petite, elle souhaitait tout le temps bien m’habiller, me faire des coiffures dont je n’avais pas grand-chose à faire. Je me souviens avoir boudé très souvent parce qu’elle me faisait des couettes ou des choses comme ça, dont j’avais horreur. En même temps, elle retrouvait sans doute dans cette image la fille qu’elle pensait avoir créée. De même, quand j’ai commencé à voyager beaucoup, je pense que je ne répondais pas tellement à son idéal. Même si cela se faisait avec beaucoup d’amour et de tendresse, il n’empêche que j’étais une fille différente de ce qu’elle avait pu attendre. Je ne restais pas beaucoup à la maison. J’étais toujours dehors, toujours en train de construire, de fabriquer quelque chose. J’étais un peu rebelle aussi, y compris à l’école. Ma première rentrée dans l’école a été très fracassante puisque j’ai passé trois à quatre jours à sauter sur les tables et à passer en dessous, au-dessus, à ne pas vouloir m’assoir. Cela devait être au niveau de la grande section à peu près. J’ai dû rentrer à l’école vers les quatre ou cinq ans, plutôt vers les cinq ans. Sans doute trop habituée à l’extérieur, je ne suis pas restée assise. Je ne devais pas comprendre ce monde où l’on devait rester assis et où il fallait se conformer à ce qui était attendu, dans ce cadre scolaire que je découvrais en tant que jeune élève.

J’ai été élevée entre la mer et la campagne. Mon école était une école très mixte. Sur le plan social aussi… De cela, j’ai gardé d’excellents souvenirs. Ce mélange a d’ailleurs nourri mon écriture. J’ai un recueil de nouvelles qui se passent dans un bar où j’allais à l’occasion avec mes parents. C’était un café dans un port, où se retrouvaient aussi bien le directeur de l’école, l’agriculteur, que le pécheur, que le notaire… J’ai toujours aimé ces endroits où finalement, tout le monde pouvait se retrouver dans un même lieu, prendre un verre ensemble et ainsi mieux se comprendre.

Mon œuvre

Mon travail d’écriture a véritablement commencé dans les années 1990. En fait, il commence avec mon arrivée à La Réunion, sans doute parce que dans des moments particuliers comme ceux-là, il est important et peut-être nécessaire de se pencher un peu sur soi, en explorant ses propres passions. D’un coup, la famille (la grande famille élargie : les frères, les sœurs, les parents) n’est plus là. Les habitudes dans lesquelles j’étais, en Bretagne, ne sont plus possibles. L’arrivée à La Réunion oblige effectivement à se reconstruire, ou à se construire un monde. L’écriture a trouvé place dans ce monde-là.

J’ai commencé par un texte difficile que j’ai soumis à un concours. Cela a été une première façon de commencer à écrire, tout en étant masquée : proposer un texte dans le cadre d’un concours sans se dévoiler. Ce premier texte évoquait la question du viol et du silence qui pesait autour de ces questions très difficiles, que je sentais auprès de moi, chez les petites filles et chez de jeunes enfants. Dans ce premier roman, Le Silence des maux, j’ai évoqué l’histoire d’une petite fille qui se faisait agresser. J’évoquais aussi ce silence, cette espèce de chape de plomb qui pesait encore à l’époque sur toutes ces pratiques dont on ne parlait pas. Peu à peu, ce travail s’est développé et j’ai commencé à y prendre goût. J’ai eu le premier Prix Jacques Lacouture (décerné par la Direction de la Jeunesse et des Sports de La Réunion), pour Oumo : c’est un prix Jeunesse Océan Indien.

Par la suite, j’ai continué le travail d’écriture. Les moments de solitude que j’avais et les moments de retrait me permettaient, par l’écriture, de dire un certain nombre de choses que je ressentais. Cela me permettait aussi de me construire, dans un endroit différent de celui que j’avais quitté. Par la suite, en 2000, j’ai publié trois textes en même temps. Avant 2000, il y a eu 1999, avec une publication d’un recueil de nouvelles de l’Océan Indien [Entrée libre]. Vous l’avez compris, je voyage beaucoup. J’ai créé un premier recueil de nouvelles qui circulait dans les îles et dans les espaces de l’Océan Indien, mais aussi dans les espaces de différentes réalités sociales. On passe d’une sorte de révolte dans les salines à l’île Maurice à un transport d’animaux à Madagascar, en passant par un vol vers Moroni, avec une petite fille délaissée par son papa dans l’aéroport.

On côtoie aussi l’université à La Réunion. En fait, beaucoup de personnes diffèrentes naviguent dans ces divers espaces. En 2000, j’ai proposé trois premiers textes, trois nouvelles, à Océan Éditions. La collection Tropicante a commencé là, puisque Monsieur Boyer, le directeur d’Océan Éditions, a accepté ces trois textes d’un coup. Je ne m’y attendais pas. Nous avons donc créé la collection Tropicante. Tropicante, pourquoi ? Trop piquante ? Pas assez piquante ? Tropical ? Il y avait un jeu de mots autour de ces histoires pimentées qui s’attaquaient aux questions sociales contemporaines. En 2000, c’était assez nouveau dans l’espace éditorial à La Réunion, en jeunesse. Le nombre de productions pour la jeunesse n’était pas très important à ce moment-là. Il s’est fortement développé depuis, avec la création des salons et toute une dynamique autour de la production pour la jeunesse. Il ne faut pas oublier que la jeunesse constitue presque la moitié de la population de l’île de La Réunion. Il faut donner à cette jeunesse des livres, ce que j’essaie de faire dans la collection Tropicante : des livres contextualisés, mais en même temps, des ouvrages qui parlent de termes universels, traités avec un ancrage régional. Il me semblait important que les enfants d’ici puissent s’ouvrir à l’extérieur par le biais de la littérature. On ne peut pas tous voyager, comme j’ai eu la chance de le faire, mais on peut voyager par les livres, par le spectacle et par l’imaginaire. Tout cela me semblait important à proposer à ces enfants. Il me semblait également important de travailler avec eux les questions contemporaines. On avait beaucoup travaillé la dimension du passé à La Réunion. Bien sûr qu’il faut continuer à la travailler, parce que le présent se comprend mieux en saisissant aussi ce qu’a pu être le passé. Mais, il me semblait tout aussi important d’aborder avec et pour les enfants les questions sociales qui les touchent actuellement. Les enfants sont des acteurs sociaux, fortement impliqués dans la société qui ne les épargne pas. Cette collection, qui comporte actuellement [en 2009] treize titres, se veut être un support, un vecteur d’échange. Cette collection est illustrée. Elle est illustrée non pas par des illustrateurs pour la jeunesse, mais par des artistes professionnels qui, pour la plupart, sont à La Réunion. Je leur demande de mettre leur talent au service des enfants. Les enfants n’ont pas tous l’occasion de faire les galeries comme j’ai la chance de pouvoir le faire. Ils n’ont pas tous l’occasion de voir les œuvres. J’ai sollicité ces artistes pour que dans un ouvrage, ils ne proposent pas aux enfants d’accéder aux illustrations faites pour eux, mais véritablement à un travail d’artiste. Un travail en combinaison, en complément, en amplification du texte, et non pas en répétition ou en « illustration » du texte, comme on peut l’entendre souvent, selon le sens commun.

Ayant développé le travail dans le domaine de la jeunesse, j’ai eu la chance de rencontrer un autre éditeur en France métropolitaine, qui s’appelle « Où sont les enfants ». Le directeur Tieri Briet – c’est un autre bonheur – propose un travail d’équipe, de construction des ouvrages. L’éditeur a souhaité consacrer son travail au développement de la photographie dans le livre pour la jeunesse. C’est tout un autre travail, complémentaire de ce que j’ai pu faire auparavant, un travail où finalement nous sommes amenés à travailler avec les enfants pour construire les images, pour choisir eux, pour faire le casting aussi… Des enfants que nous allons prendre dans l’histoire pour les faire jouer avec nous… Pour composer les plans, pour construire véritablement les livres que les enfants vont pouvoir lire après. Dans ces ouvrages, la photographie est là. Mais ce n’est pas une photographie documentaire. C’est une photographie qui interroge, encore une fois, le lien entre la fiction et la réalité. Les éléments de la photographie sont construits avec l’ordinaire, et en même temps, la photo nous transporte dans la fiction. On a tout un nouveau monde de voyage et d’imaginaire qui se construit à partir de la réalité, et nous fait aller ailleurs.

Il y a une nouvelle aventure qui commence avec une autre maison d’édition, qui s’appelle La Cheminante, dirigée par Sylvie Darreau. Elle a beaucoup cheminé, elle aussi, à travers le monde. Nous nous sommes rencontrées à La Réunion, mais c’est finalement à Dakar où nous avons eu la chance de construire ce projet de livre. Le hasard a fait que nous nous sommes rencontrées à Dakar, ce qui est quand même assez étonnant. C’est là où nous avons mis sur pied sa maison édition. Mais c’est elle, bien sûr, qui a mis sur pied sa maison d’édition. Cela tombait au même moment que la naissance de mon roman (la naissance potentielle, en tout cas). Le raccommodeur de poussières est un roman qui nous fait partir de l’Italie (de la Sicile), avec un personnage qui fuit l’Italie après un tremblement de terre qui a beaucoup détruit les siens et son environnement proche. Mais il se détruit aussi, lui-même. Il arrive à Madagascar en pensant peut-être faire de nouvelles conquêtes, envisageant de se raccommoder et de raccommoder les poussières qui sont chez les autres. Je ne veux pas dévoiler la fin de ce roman, mais c’est un texte à deux voix : la voix de la personne qui est enfuie sous les décombres, qui continue à être là et continue à parler, et la voix du personnage principal qui, lui, est au-dessus et cherche. Il entend toujours cette voix, il essaie de se fondre dans une culture qui lui est très étrangère. Il essaie de s’y fondre et en même temps, il a beaucoup de difficultés : il y a en lui le décalage dans lequel il est.

Il y a d’autres projets en cours, dont un autre ouvrage à trois voix. J’aime beaucoup ce défi dans l’écriture : faire parler plusieurs personnages, soit avec le « je » (qui peut être le « je » de plusieurs personnes différentes), soit sous d’autres formes, comme dans le roman. Cet autre texte est à sortir chez « Où sont les enfants » en 2010, peut-être. Une histoire d’une enfant qui va découvrir sa double paternité : le papa qui l’a conçue et l’autre papa qui s’occupe d’elle, qui gère finalement tout le quotidien avec elle et lui en apprend beaucoup sur la vie, sur ses passions. L’autre papa surgit à un moment où elle ne s’y attend pas. Cette histoire donne la parole à ces deux papas et à cette petite fille. Tout le livre est une construction entre les trois.

Dans la plupart de mes textes, il y a des réalités qui ne sont pas édulcorées, qui sont saisies parfois sur le vif avec la douleur qu’elles peuvent comporter. En même temps, c’est aussi lié à mon enfance :on construit, on va de l’avant et on ouvre des portes, on ouvre des chemins. Ces chemins ne sont jamais des modèles, même dans la littérature pour la jeunesse. Ce sont des chemins qu’il faut trouver, des solutions. Ce sont des portes qu’il faut explorer, non pas comme des modèles, mais plutôt comme des possibles qu’il faut sans doute confronter avec d’autres auteurs. Il y en a assez qui sont suffisamment bons pour qu’on les propose aussi aux enfants et aux adultes, de façon à ce que chacun puisse réfléchir, se construire lui-même avec tous ces apports.

L’Insularité

Je ne me suis jamais sentie emprisonnée ici. Bien sûr, c’est une île… D’une part, le monde que nous avons à La Réunion est si riche de cultures, de diversités, d’hétérogénéités, que c’est impossible de se sentir enfermé. Justement, c’est tout l’inverse ici. C’est une ouverture très grande. Même si je me trouve sur une île, je n’ai jamais senti cet enfermement. D’abord, je me sens foncièrement dans l’Océan Indien, et pas uniquement à La Réunion. Je crois que cela se sent dans mon travail. J’ai commencé par ce recueil de nouvelles sur l’Océan Indien. La collection Tropicante est aussi inscrite dans l’espace insulaire et l’Océan Indien. J’ai beaucoup circulé entre Madagascar, Maurice, les Seychelles, Mayotte. On peut quand même bouger quand on se sent un peu enfermé ici ! Certes, j’ai la chance de pouvoir beaucoup voyager. Mais en même temps, si je ne pouvais pas voyager, cela ne serait pas un véritable problème. J’ai l’écriture aussi pour m’échapper. J’ai accès à la culture, aux livres. L’enfermement, quand on le sent, c’est celui qu’on se crée. En tout cas, c’est mon point de vue.

Il me semble que le fait d’être sur un espace insulaire oblige encore plus qu’ailleurs à être en curiosité de ce qui se passe à l’extérieur. Sur le terrain professionnel, j’ai eu l’occasion de m’en rendre compte. Je travaille aussi à l’université en tant qu’ethnosociologue de l’éducation, de l’information, de la santé. De la même façon, j’ai toujours ressenti ma présence à La Réunion comme relevant d’une possibilité d’analyser un laboratoire vivant, en permanence bouillonnant. Ce qui ne m’a jamais donné cette sensation d’enfermement. Bien sûr, je reste attachée aux îles. En Bretagne, il y avait autour de moi ces endroits que j’ai toujours aimés. Ils sont petits et leur ceinture, c’est la mer : on voit la mer partout. Je suis née au bord de la mer et j’ai du mal à m’en passer. Bien évidemment, ici, je suis comblée. Cette présence tout autour ne m’enferme pas. Au contraire, on peut sortir d’une île par bateau, par avion. C’est vrai que l’inconvénient ici, c’est de devoir sortir le plus souvent par avion. C’est coûteux et il faut s’organiser à l’avance. Sur des continents, j’ai eu l’occasion de voir des gens très enfermés dans des espaces très vastes. Cette question [de l’insularité] pour moi ne se pose pas dans ces termes-là. Au contraire, j’ai essayé d’en faire une richesse. Peut-être que cela m’a obligée à ne pas m’endormir sur moi-même. J’ai toujours été curieuse de ce qui se passe à l’extérieur et j’ai toujours eu envie de connaître ailleurs pour mieux revenir aussi dans l’endroit où je suis, là où j’ai choisi de vivre et où je suis restée… Cela fait maintenant une vingtaine d’années… Donc, si cela avait été trop pesant, j’avais la possibilité de repartir : je ne l’ai pas fait. Je crois que c’est un endroit qui va bien de ce point de vue…


Maryvette Balcou

Balcou, Maryvette. « 5 Questions pour Île en île ».
Entretien, Saint-Denis (2009). 30 minutes. Île en île.
Mise en ligne sur YouTube le 8 juin 2013.
(Cette vidéo était disponible sur Dailymotion du 8 mars 2011 jusqu’au 13 octobre 2018.)
Entretien réalisé par Thomas C. Spear.
Notes de transcription : Coutechève Lavoie Aupont.

© 2011 Île en île


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mis en ligne : 8 mars 2011 ; mis à jour : 26 octobre 2020