Déwé Gorodé, L’épave


(extrait)

« Car, je vais te dire, moi, la seule chose qui intéresse ces beaux messieurs, c’est notre nickel, point barre. Plus, évidemment, leurs commerces, magasins, et tout le bazar, hein ! Et là-dessus, tu peux y aller, ils sont tous pareils, les mecs, quand il s’agit de leurs gros sous et autres gros trafics ! Parce que le Caillou, comme ils disent, c’est juteux, c’est très juteux même ! À quel point ! On n’a même pas idée tellement qu’on nous a toujours virés de la cour des grands ! Ouais, c’est toujours le gros bizness avec des sacrés profits pour leurs grosses sociétés, comment on dit encore dans votre journal, là ? Ah oui, les multinationales ! Et maintenant qu’on est parti, avec ce partenariat qui est bon pour nous, dans le nord, dans le sud, ils vont déverser les saletés de la mine dans le canal de la Havannah. Seigneur, mais le canal, ma sœur, c’est le passage de tous les ancêtres d’ici, là ! Non, mais, tu te rends compte ? Mais où on va, là, avec tout ça ? Tu veux que je te dise ? Eh ben, moi, j’ai rêvé de là, là, avec un pays dans l’eau huileuse, avec des hommes assis et leurs ignames debout dans l’eau ! Et je les voyais de très, très haut, comme d’une haute montagne et des épaules d’un géant ! Et tu vois, ça, c’est vraiment le genre de rêve qui me fout vraiment la trouille, tu vois ! Ah, la, la ! J’en ai encore froid dans le dos, là ! … »


Lu par l’auteure, cet extrait est tiré de L’épave, roman par Déwé Gorodé publié pour la première fois à Nouméa aux Éditions Madrépores en 2005, page 65. Extrait reproduit avec la permission de l’auteure.

© 2005 Déwé Gorodé  ; © 2006 Déwé Gorodé et Île en île pour l’enregistrement audio (1:00 minute).
Enregistré au Salon du Livre de Paris le 19 mars 2006.


Retour:

/dewe-gorode-lepave/

mis en ligne : 1 avril 2006 ; mis à jour : 27 décembre 2020