Carmen Yañez, poésie – Boutures 1.3

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Poésies
vol. 1, nº 3, page 30

 

Prodigio

à Marcia Scantlebury  

Si en aquellos días de octubre
las negras vendas
cuando de verdad el miedo
mordía las carnes.
Y nosotras escondiendo nombres
en los pliegues del sudor.
Nunca estuvimos más cerca
de las rosas
¿Te acuerdas de las rosas
que paradójicamente crecían allí.
En el centro mismo del dolor?
Hermosas rosas…
de las que se nos negó
el favor de su perfume
pero no sus tristes espinas.Si en aquellos días de octubre
en Grimaldi
cuando ni mi olfato
me decía que despertarías,
Marcia,
te hubiese hablado
sólo por consolarte
por curarte la herida de la cara
por despejar el aire de un mal sueño
por volver la vista atrás
tomando el tiempo por las astas
y reconstituir la tela de cebolla
que nos cubrió
hasta entonces.
Si te hubiese hecho una promesa,
si hubiese predicho
un encuentro, en una ciudad
lejana, bella
San Marcos, Venecia
la ciudad de los reencuentros
prodigiosos.
No me habrías creído
No me habrías creído
porque la muerte batía alas
allá afuera
y la bondad callaba.

Prodige

à Marcia Scantlebury

Si en ces jours d’octobre
les noirs bandeaux
lorsque la peur pour de vrai
mordait les chairs.
Et nous, cachant les noms
dans les replis de la sueur.
Jamais nous ne fûmes plus proches
des roses.
Te souviens-tu des roses
qui paradoxalement poussaient là
Au coeur même de la douleur?
Belles roses…
de celles dont on nous refusa
la faveur du parfum
mais pas les tristes épines.Si en ces jours d’octobre
à Grimaldi
lorsque pas même mon flair
me disait que tu te réveillerais,
Marcia,
je t’avais parlé
ne serait-ce que pour te consoler
te soigner la blessure du visage
chasser de l’air un mauvais rêve
regarder derrière soi
en remontant le temps
et retisser la pelure d’oignon
qui nous couvrit
jusqu’alors.
Si je t’avais fait une promesse,
si je t’avais prédit
une rencontre, dans une ville
lointaine, belle,
San Marcos, Venise
la ville des retrouvailles
prodigieuses.
Tu ne m’aurais pas cru
Tu ne m’aurais pas cru
parce que la mort battait de l’aile
là-bas au-dehors
et la bonté se taisait.

(Traduction : Louis-Philippe Dalembert)

bout
Carmen Yañez
née au Chili en 1952. Militante politique, elle disparaît dans les mains de la police politique de Pinochet en 1975. Donnée pour morte, elle finit par échapper à l’enfer de Villa Grimaldi (la prison secrète de la sinistre DINA), vit dans la clandestinité jusqu’en 1981, date à laquelle, via l’Argentine et sous la protection de l’ONU, elle part en exil en Suède. Elle vit aujourd’huit à Gijón, en Espagne. Son premier recueil de poèmes, Cantos del camino, paraît en 1982. Elle publie par la suite Al aire (1989), Remanso (1992), Paisajes de luna fría (1999). Ses poèmes sont traduits en allemand, italien, suédois, français.

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mis en ligne : 2 janvier 2002 ; mis à jour : 26 octobre 2020