Abdou S. Baco, Une colère douce amère Dans un cri silencieux

Une colère douce amère Dans un cri silencieux

Interview avec Abdou Salami Baco
par Nassuf Djailani


Nassuf Djailani: Pourquoi le titre Dans un cri silencieux ? Est-ce une référence à Richard Wright ?

Abdou Salam Baco: Absolument, en référence à son recueil de nouvelles intitulé Huit hommes.

ND: Quelle est la part d’autobiographie et de fiction ?

ABS: Toute fiction est basée sur la réalité, sur des faits vécus par vous ou par votre entourage ; bien sûr, il y a beaucoup de Baco dans Bana, comme il y a beaucoup de Baco dans Fani également. La part d’autobiographie est moins marquée ici que dans Brûlante est ma terre, mais elle est là car je ne pouvais pas y échapper. Mais Dans un cri silencieux c’est d’abord une fiction.

ND: Vous citez Richard Wright, pouvez-vous nous en parler ? c’est un auteur qui vous est cher ? et Fanon ?

ABS: Ah ! Richard Wright, quel grand homme ! pour moi, c’est le plus grand écrivain noir américain de tous les temps, avec James Baldwin. J’ai lu tous ses ouvrages, et je pense que c’est lui qui m’a filé cette colère douce amère contre cette bêtise humaine que l’on appelle racisme que je porte en moi toujours ; pour autant, il n’a jamais été piégé par la condamnation unilatérale ou encore la généralisation. Dans la littérature, c’est lui mon maître à penser. Tu remarqueras que mon dernier recueil de nouvelles s’intitule Cinq femmes, c’est un clin d’œil à ce cher Richard avec son recueil Huit hommes.

Quant à Fanon, c’est autre chose ; je dirai que c’est Baco aujourd’hui, mais je suis moins talentueux bien sûr. J’ambitionne d’écrire un jour un ouvrage aussi puissant que Les damnés de la terre, car tous les thèmes développés dans ce chef-d’œuvre restent malheureusement d’actualité chez nous.

ND: Quelle est la part de fiction ? De quelle année date la grève dont vous parlez ?

A.B.S.: Il y a eu deux grèves : en 1976 et en 1980 ; à chaque fois, nous, les gens de la brousse, nous avons été trahis par les gens de la ville.

ND: Bana, c’est vous ? un m’matsaha (un moins que rien) ?!

ABS: Non, Bana ce n’est pas moi ; disons que Bana portait en lui une partie de moi, ou inversement, c’est selon. Il n’est pas m’matsaha, ce sont les gens de la ville qui le voient ainsi du fait qu’il vient de la brousse.


« Une colère douce amère Dans un cri silencieux », est un entretien d’Abdou Salam Baco inédit, publié pour la première fois sur Île en île. Propos recueillis par Nassuf Djailani le 29 octobre 1994.


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mis en ligne : 12 avril 2006 ; mis à jour : 25 avril 2021