Louise Peltzer, « La Petite Pirogue »

La petite pirogue baisse les yeux, elle est honteuse,
Elle ne comprend pas que partout où elle va,
Avouez qu’elle a bien raison d’être malheureuse,
Une espèce de balancier la suit pas à pas.

Seule, elle n’y pensait pas mais depuis l’arrivée
D’une flottille de sirènes venue du continent,
La différence est éclatante, c’est la liberté.
Nul balancier ne vient entraver leurs mouvements.

Cruelle injustice, la pirogue ne peut plus tenir.
Cette nuit même, quoi qu’il arrive, elle a décidé,
Comme ses voisines, de penser à son avenir,
De quitter son balancier, de se libérer.

Rapide et leste, notre petite amie s’activa.
En un rien de temps, le ‘iato fut détaché,
Hélas, sans son ama, la pirogue chvira
A l’aide, implora la malheureuse, dépitée.

Rassurez-vous, la petite pirogue fut sauvée
Par ses voisines accourues la soutenir
Et qui rêvaient de grâce et de vélocité
Que donne le balancier à nos petits navires.

Ne soit pas trop pressée de quitter ton passé,
C’est la stabilité, l’aide pour devenir lucide.
Fais face aux lumières de l’avenir, assuré,
Sans craintes, celles du passé te servant de guide.


«La Petite Pirogue» a été publiée pour la première fois dans Hymnes à mon île.  Papeete: Polycop, 1995.
© 1995 Louise Peltzer;  © 2002 Île en île.


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mis en ligne : 9 janvier 2002 ; mis à jour : 26 octobre 2020