Rassoul Labuchin

Rassoul Labuchin, photo © Thomas C. Spear Montréal, avril 2011

photo © Thomas C. Spear
Montréal, avril 2011

Joseph Yves Médard, de son nom d’artiste Rassoul Labuchin, est né le 30 mars 1938, à Pétion-Ville.

Rassoul Labuchin devient très tôt un grand militant syndicaliste. En 1959, il fonde le Mouvement Théâtral Ouvrier (MTO) au sein de l’Intersyndical d’Haïti, dirigé à l’époque par Ulrick Joly. Le MTO réalisera des spectacles de théâtre tous les samedis durant un an, jusqu’à l’interdiction de l’Intersyndical d’Haïti par François Duvalier. Rassoul est également membre du Parti d’Entente Populaire, parti au sein duquel Jacques-Stephen Alexis joue le rôle de secrétaire général.

Rassoul fréquente la faculté de génie Leconte de Port-au-Prince jusqu’en 1968. À sa dernière année, il doit interrompre ses études car il est capturé par des membres des Volontaires de la sécurité nationale, les Tontons macoutes, sous Papa Doc, puis torturé aux Casernes Dessalines. Il y restera durant plus d’un mois. Il refuse de signer le document exigé par François Duvalier, stipulant qu’il renonçait entièrement aux luttes menées par les jeunes marxistes de l’époque. Quelques jours plus tard, Rassoul échappe de justesse à la prison, parce qu’il allait participer à une émission organisée par les créolistes à Radio-Caraïbes. Tous les participants à cette émission ont été incarcérés à Fort-Dimanche durant un an. Rassoul fera de la prison à trois reprises sous les Duvaliers à cause de ses convictions idéologiques. Durant son troisième emprisonnement, en 1981-82, sous la pression, entre autres, du président français François Mitterrand, de son épouse Danielle et d’une très jeune Sophie Marceau, âgée alors de treize ans, Rassoul sera libéré, pour être envoyé en exil en France. À son retour en Haïti, Rassoul fut sollicité par Marceau, âgée alors de 18 ans, pour jouer dans le film Descente aux enfers en 1986.

Parallèlement à son militantisme, Rassoul Labuchin a mené une longue carrière dans l’enseignement. Il a enseigné le français et le créole à l’Institut français d’Haïti. Ses nombreux intérêts incluent, entre autres, le théâtre, la poésie, la littérature, le cinéma et l’opéra.

En 1991, il est nommé directeur du Théâtre national d’Haïti, par le président Jean-Bertrand Aristide, poste qu’il occupe en 1991, puis de 1996 à 2001. Rassoul Labuchin est nommé maire de Port-au-Prince en 2002 pour pallier à un vide administratif ; il reste maire de la capitale haïtienne jusqu’en 2004. Maryaj Lenglensou, un projet de la mairie de Port-au-Prince, a été conçu pour être présenté le 2 janvier 2004 dans le cadre des commémorations du bicentenaire de l’indépendance d’Haiti. Premier opéra haitien, dont la musique est du compositeur haïtien Ipharès Blain et le livret de Rassoul Labuchin, Maryaj Lenglensou est joué dans une vingtaine de villes d’Haiti en 2007.

Rassoul a été membre du comité de rédaction de la revue Conjonction de l’Institut français, membre de jury du Prix Henri Deschamps, membre de jury du Prix de Casa de Las Americas, membre de jury du Cinéma latino-américain.

Il est l’auteur de poésie en créole, traduite en anglais, espagnol, français, hollandais, danois et russe.

Rassoul a également travaillé dans plus d’une vingtaine de films. Il a, entre autres, interprété le rôle d’Aurélien dans Gouverneurs de la rosée de Maurice Failevic et a rédigé le scénario de M ap pale nèt, réalisé par Raphaël Stines. Il est l’auteur et réalisateur du film Anita, considéré comme l’un des films qui a ouvert la voie au cinéma haïtien, selon le dictionnaire Larousse du cinéma.

Installé à Montréal depuis mars 2010, suite au séisme qui a dévasté Haïti, Rassoul Labuchin termine la rédaction de son premier roman, Les yeux de l’aube.

– Mylène Dorcé


Oeuvres principales:

Poésie (en créole):

  • Trois colliers maldioc. Port-au-Prince: Imprimerie des Antilles, 1962.
  • Compère. Port-au-Prince: Imprimerie des Antilles, 1964.
  • Compère, suivi de Dégui. Port-au-Prince: Imprimerie des Antilles, 1968.

Nouvelles:

  • Et la fête sera belle. Port-au-Prince: Deschamps, 1979, 83 p.
    « Mamona, fille de l’étang », « Le loup-garou blanc », « Le ficus » et « Grenadine ».

Conte:

  • Le ficus, par Michaëlle Lafontant-Médard et Rassoul Labuchin. Port-au-Prince: Imprimerie Théodore, 1971.

Théâtre:

  • Rassoul Labuchin est l’auteur, metteur en scène et comédien d’une trentaine de pièces, jouées par le MTO (Mouvement théâtral ouvrier) dans le cadre des activités de loisir de l’UIH (Union Intersyndicale d’Haïti) dans les années 1974-75. (Voir Notes sur le développement du mouvement syndicale en Haïti par Jean-Jacques Doubout et Ulrick Joly, 1974, p. 52.)
    • Parmi ces pièces, il y a notammant La Grève des ouvrières de café, Maître Sonson et Maître Aliboron et Le Roi Moko.
    • Le Roi Moko, de Rassoul Labuchin, est joué avec les étudiants de l’École Normale supérieure à l’Institut français, ce qui déclenche une manifestation des étudiants au Bicentenaire en 1972. La pièce est adaptée et jouée à Québec dans le cadre de la Franco-Fête de 1975.
    • Ti-Crabe et grenadine, de Rassoul Labuchin, est joué à l’Institut français dans une mise en scène de Jean-Paul Micouleau (vers 1976).
    • M ap pale nèt, de Rassoul Labuchin (adaptation en créole du Bel Indifférent de Jean Cocteau), joué par Richard Brisson et Jessie Alphonse, 1977. Cette pièce de Rassoul est adaptée au cinéma en 1976 par Raphaël Stines avec Jessie Alphonse et François Latour ; M ap pale nèt est considéré comme le premier film de fiction haïtien.
  • Directeur du Théâtre national d’Haïti, Rassoul Labuchin – avec Syto Cavé comme directeur de la scène – fait jouer de nombreuses pièces de théâtre. Ce Fou d’Empereur de Claude Innocent est un exemple, pièce jouée au Bénin (vers 1996). Durant ces années (1996-2001), beaucoup d’activités théâtrales sont réalisées dans les administrations de l’État, dans les prisons, dans les marchés publics et dans les quartiers populaires.

Filmographie:

  • comédien:
    • Gouverneurs de la rosée. Adaptation du roman de Jacques Roumain par Maurice Failevic, 1974, 107 min.
    • Descente aux enfers. Adaptation du roman de David Goodis par Francis Girod, 1986, 88 min.
  • réalisateur, scénario:
    • Anita, fille d’Haïti. Réalisateur, scénario, directeur: Rassoul Labuchin, avec Suzelle Auguste, Chantal Guerrier, Magalie Marcellin, Rodrigue Montfleury, Ti Corn. Musique: Hans Fels. Prod.: Mouvement Haïtien pour l’Épanouissement de l’Enfant (MHEE), 1980, 45 min.
    • Joumankòlè (Jour de colère). Réalisateur, scénario, directeur: Rassoul Labuchin. Filmé au Mexique, 1983, 83 min.

Opéra:

  • Maryaj Lenglensou (Le Mariage Lenglensou), opéra en trois actes. Livret: Rassoul Labuchin. Musique: Ipharès Blain. Choeur et orchestre Lenglensou. Jouée en Haïti en 2007. Directeur du film: Hans Fels. 2007, 93 minutes.

Roman:

  • Les yeux de l’aube. Montréal: Jacques Trouillot Imprimeur, 2012.

Sur l’oeuvre de Rassoul Labuchin:

  • Deschamps, Marguerite. À la découverte de Rassoul Labuchin, poète du réalisme merveilleux. Port-au-Prince: s.m., 1974, 20 p.
  • Hubert, Lucie et Ipharès Blain. Un opéra en Haïti: Maryaj lenglensou. Chevilly-Larue: Monde global, 2009.

Liens:

sur Île en île:

  • icon_video Rassoul Labuchin, Les yeux de l’aube, extrait du roman lu par l’auteur (2011), vidéo, 9 minutes.
  • icon_video Rassoul Labuchin, extraits de textes lus par l’auteur : poésie en créole (« Tonton makout volè rèv », « Pwezi damou », « Lanmou », « Revolisyon » et « Leson misik ») et des extraits de prose en français (« Le Loup-Garou-Blanc » et « Grenadine »), 1992, vidéo, 10 minutes.
  • icon_video Rassoul Labuchin, 5 questions pour Île en île, entretien vidéo réalisé en avril 2011 à Montréal (113 minutes).

ailleurs sur le web:


Retour:

Dossier Rassoul Labuchin préparé par Mylène Dorcé

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mis en ligne : 30 mars 2012 ; mis à jour : 25 novembre 2015