Jean Vanmai, 5 Questions pour Île en île


Jean Vanmai répond aux 5 Questions pour Île en île.

Entretien de 33 minutes réalisé chez l’auteur à Nouméa par Thomas C. Spear.

Notes de transcription (ci-dessous) : Fred Edson Lafortune.

Dossier présentant l’auteur sur Île en île : Jean Vanmai.

début – Mes influences
01:58 – Mon quartier
06:09 – Mon enfance
11:28 – Mon oeuvre
24:44 – L’insularité, et l’Association des Écrivains de la Nouvelle-Calédonie


Mes influences

Je suis arrivé à la littérature par accident et par devoir. Il fallait raconter l’histoire de mes parents et de mes compatriotes en Nouvelle-Calédonie à l’époque coloniale. Je n’étais pas sûr de pouvoir écrire. J’ai dû prendre des cours par correspondance à Paris. C’est ainsi que j’ai eu la joie de découvrir beaucoup de textes des grands auteurs comme Bossuet, Stendhal ou Flaubert que j’adore.

À Ouessant, j’ai eu le plaisir d’entendre un texte de Rodney Saint-Éloi. Avec son petit séjour d’une semaine en résidence à Ouessant, cet éditeur haïtien a écrit un texte extraordinaire. Ce sont des choses qui me touchent. La différence entre Rodney Saint-Éloi et moi, c’est qu’il est capable d’écrire de la poésie et des déclamations, alors que moi, je travaille plutôt sur de longs textes.

Mon quartier

Nous sommes venus dans cet immeuble en 1991. Il n’y avait encore personne. Nous étions les premiers habitants. Nous avions choisi cet étage parce que nous avions cette impression – et nous l’avons encore aujourd’hui – d’être à bord, sur la passerelle d’un paquebot, face à la mer. C’est formidable. Nous étions un peu angoissés dans la mesure où tout était nu au début : il n’y avait pas de fleurs, pas d’arbres, pas d’oiseaux… Je me disais que jamais il n’y aurait d’oiseaux par ici. Aujourd’hui, il y en a beaucoup. Ils viennent nous tenir compagnie le matin, je leur sers le « petit déjeuner ». C’est formidable.

Le quartier, tel qu’il est, est un quartier de gens aisés. Cela me gêne un peu. Mais le fait de me sentir bien dans cet endroit comble cette gêne. Tout autour de nous, ce sont des gens qui ont réussi par leur travail. Ce ne sont pas de grands héritiers ou de grands riches. Ce sont des gens méritants. Nous avons juste à côté la piscine de CNC [Cercle des Nageurs calédoniens] qui fournit de grands champions de la natation à la France. Nous avons La Poste, Le Trésor qui distribue l’argent aux fonctionnaires et à ceux qui viennent de France pour travailler pour la Nouvelle-Calédonie et un grand shopping center : tout est concentré ici. Au bord de mer, les bateaux de plaisance sont là. Je les vois partir le dimanche et rentrer le soir, sans avoir besoin d’y aller. Compte tenu de mon âge, j’y vais de moins en moins, alors que dans le temps, j’avais moi aussi un bateau.

Auparavant, j’habitais dans le quartier de la Vallée des Colons. C’est un quartier ancien avec une multitude de communautés, un quartier qui révèle cette Calédonie du passé (c’était le quartier des colons). À cette époque-là, il n’y avait que peu de maisons, pas de rues… Il y avait surtout des jardins potagers. Aujourd’hui, c’est toujours un quartier extrêmement agréable où l’on peut encore trouver des maisons coloniales. Elles sont hélas détruites de plus en plus, au profit de grandes habitations modernes. Cela donne un aspect plutôt désolant, et c’est ce qui fait perdre son charme à la ville de Nouméa avec son cadre colonial du passé qui disparaît peu à peu au profit du béton.

Les touristes découvrent les fumées des fours de nickel avant de découvrir Nouméa. C’est surprenant. Ces fours jettent dans l’atmosphère des volutes de fumée et de poussière rouge. Au beau milieu du ciel du Pacifique, c’est quelque chose d’étrange. Mais il fallait qu’on passe par là pour le développement économique et pour l’exploitation du nickel. Nous deviendrons, paraît-il, le plus grand pollueur du monde après la Chine.

Mon enfance

J’avais une enfance normale. Vraiment déshéritée et malheureuse. Nous vivions de pas grand-chose à l’époque. Mon père travaillait seul, et ma mère s’occupait de ses neuf enfants dont je suis l’aîné. Nous vivions à l’époque sur la mine Chagrin à 400 kilomètres d’ici. Mes parents étaient venus du Viêtnam avant 1939 pour travailler dans cette mine de chrome. Les conditions de vie de mes parents étaient extrêmement difficiles. Avec le peu d’argent qu’ils avaient, ils s’occupaient de nous comme ils le pouvaient. Mon père ne bénéficiait ni de l’assurance sociale, ni de soins de maladie. Tout était à sa charge. C’était une vie de misère.

J’ai conservé malgré tout un très bon souvenir de ce temps, c’était excellent pour moi. Je vivais pieds nus avec des sabots fabriqués par mon père sur un morceau de planche avec un bout de cuir par-dessus. J’ai eu ma première paire de chaussures vers dix ans. Quand je les ai essayées, je suis tombé par terre parce que je les avais mises à l’envers.

Nous n’avions pas le droit, tout comme les petits Kanak de cette époque, de fréquenter les écoles françaises. Les Kanak avaient leurs propres moniteurs dans leurs tribus. Étant donné que mes parents étaient venus sous contrat de cinq ans, et qu’ils étaient bloqués en Nouvelle-Calédonie à cause de la Seconde Guerre mondiale, nous étions abandonnés à nous-mêmes. Du coup, tous les parents du village tonkinois avaient décidé de payer un maître pour nous apprendre à lire et à écrire en vietnamien. C’était l’école la plus bruyante de la terre ! Nous avions le droit de lire à haute voix, et même très fort, de réciter nos leçons de la même façon. J’ai toujours gardé un souvenir attachant de cet aspect. Tout était fait d’une façon plutôt primaire. Très simple. À l’âge de onze ans, mon père, finalement par son travail, avait réussi à me faire rentrer à l’école française. J’ai commencé à parler la langue française à l’âge de onze ans. Les premières semaines étaient catastrophiques parce que je ne comprenais rien.

Je suis né en 1940. Vers 1945, c’était la fin de la guerre du Pacifique. De cette guerre, je n’ai rien entendu parler à l’époque. Ce que je savais, c’est qu’au-dessus des montagnes venant du nord, c’était des escadrilles d’avions qui revenaient de la guerre, passant au-dessus de notre village minier. À ce moment-là, je ne comprenais rien. Je les voyais comme de petits oiseaux noirs dans le ciel. Je cherchais vite une perche pour essayer de les attraper.

Mon œuvre

Mes parents étaient venus ici juste avant la Seconde Guerre mondiale. Après la guerre contre l’armée allemande, la France était réduite à néant. Mes parents n’étaient pas en mesure de nous ramener au Viêtnam comme prévu. Nous sommes restés ici jusqu’en 1960, c’est-à-dire, une période de vingt ans.

Quand j’avais vingt ans, nous avions tout déménagé pour partir au Viêtnam. À cette époque, je comprenais bien le français et je savais exactement ce qui se passait au Viêtnam avec le système communiste. Je n’étais pas tout à fait d’accord avec la propagande communiste par la radio que nos aînés recevaient par TSF : des radios qui fonctionnaient à la batterie de voiture. La propagande communiste faisait croire que le Viêtnam était dirigé par le peuple. On leur disait que les riches et les Français n’y étaient plus et que tout le peuple devenait le maître du pays. Évidemment, mes parents étaient ces engagés tonkinois. Quand ils entendaient que c’était le peuple qui dirigeait le pays, et parce qu’ils étaient ici depuis vingt ans et avaient gagné beaucoup d’argent, ils voulaient repartir au Viêtnam avec cet argent pour participer à la construction du pays en tant que citoyens et en tant que peuple. Mais, au moment où le bateau partait, je me suis enfui du bateau. Je suis le premier Vietnamien à m’enfuir du bateau, non pas parce que les Vietnamiens étaient anticatholiques, ou parce que c’était le communisme au Viêtnam, mais parce que j’avais eu la chance de connaître mon épouse. Elle n’est pas d’origine vietnamienne. Mais j’ignorais à ce moment-là que j’allais rester en Nouvelle-Calédonie pour elle. Je suis resté grâce à elle, et c’est ainsi que finalement je me retrouve en Nouvelle-Calédonie aujourd’hui.

J’ai vu partir les compatriotes et mes amis d’école pour aider à la reconstruction du pays. Ils m’ont traité de traître et de tous les vilains noms. J’ai dû subir tout cela pour pouvoir rester [en Nouvelle-Calédonie]. Au bout de quelque temps, je me suis rendu compte qu’ils s’en allaient, mais que leur histoire disparaîtrait aussi, si jamais personne ne l’écrivait. Il faudrait bien qu’un auteur, de quelque origine que ce soit, de quelque communauté que ce soit, écrive cette histoire. C’est une histoire douloureuse pour ma communauté. C’était en 1960. Jusqu’en 1974 – c’est-à-dire 14 ans après –, il n’y avait toujours rien d’écrit.

J’étais associé entretemps avec un ami calédonien dans une entreprise de distribution de matériel électroménager et nous nous retrouvions tous deux à un moment donné à Paris pour des affaires. Un jour, je suis passé devant l’École Française de Rédaction (elle n’existe plus aujourd’hui) qui dispensait des cours par correspondance sur l’écriture littéraire. Je me suis dit qu’il vaudrait peut-être mieux que j’essaie de faire quelque chose. C’est là que j’ai eu plaisir d’étudier Bossuet, Flaubert et d’autres… Et je me suis mis à écrire. En deux ans, c’est-à-dire en 1976, j’ai terminé le livre, après avoir trop souffert ! Il n’y avait pas d’ordinateur à l’époque. J’ai écrit avec des pointes Bic ; c’était très dur : je sais ce que c’est, la crampe de l’écrivain ! C’est ainsi que la Société d’Études historiques de la Nouvelle-Calédonie (SEC) a décidé de publier ce livre, Chân Dang: Les Tonkinois de Calédonie au temps colonial, malgré les réticences de certains de ses membres qui ne voulaient pas remuer le passé. « Chân » veut dire le pied et « dang » signifie engagement. Ils étaient des engagés sous contrat. C’est un surnom que les Tonkinois de l’époque (devenus par la suite des Viétnamiens) se sont donné. Les intellectuels du Viêtnam ont cherché dans tous les dictionnaires du monde et n’ont jamais trouvé ce mot, Chân Dang. Ce terme correspond un peu à celui des « Pieds noirs » en Algérie. C’est leur surnom que j’ai donné à ce livre. Ce livre existe depuis près de 28 ans et il est très populaire en Nouvelle-Calédonie. Il a d’ailleurs fait l’objet d’une étude par une universitaire de Melbourne, Tess Do, qui a écrit un texte en anglais [« Exile: Rupture and Continuity in Jean Vanmai’s Chan Dang and Fils de Chan Dang »] paru l’année dernière dans une publication chez Rodopi à New York sur les communautés en exil [Exile Cultures, Misplaced Identities, 2008].

Mais j’ai mis 25 ans pour comprendre que la France a honte de son passé et ne veut pas faire circuler ce livre. Par contre, le Viêtnam d’aujourd’hui me le demande.

Devenu auteur par accident ou par devoir, j’ai obtenu le prix de l’Asie décerné par l’Association des Écrivains de Langue française (ADELF). À ce moment-là existait à Paris un éditeur du nom de Sud-est Asie qui m’avait envoyé un contrat en bonne et due forme. Par précaution, je voulais savoir qui était le patron de cette maison d’édition. Et j’ai appris qu’il était le représentant officieux du gouvernement vietnamien communiste de 1980.

À cette époque, c’était la guerre idéologique entre les Russes, les Américains, les Libyens et tous les autres. Il ne m’était pas possible d’accepter, pour être immédiatement catalogué comme de connivence avec les communistes. J’ai raté la meilleure occasion de ma vie. Il y a environ deux ans, une autre équipe de la télévision vietnamienne a découvert le livre a m’a demandé l’autorisation de le transformer en 30 épisodes de 45 minutes pour la télévision vietnamienne. J’ai mis une condition : que ce soit une coproduction franco-vietnamienne. Je pars sur le principe que les réalisateurs sont des jeunes gens qui ont été élevés dans le cadre communiste du Viêtnam et qui pourraient avoir là une occasion de dénoncer le colonialisme, le système capitaliste et que je n’aurais pas de prise dessus. Ils ont refusé ma demande, disant que cela devait être une production vietnamienne uniquement. Et j’ai dû refuser à mon tour.

Aujourd’hui, le livre fait l’objet d’une traduction au Viêtnam. Il intéresse maintenant la diaspora vietnamienne du monde entier. Mon épouse est persuadée que ce livre, traduit en anglais, serait un grand succès dans le monde. Je n’ai jamais osé passer à ce stade.

Des cinéastes de Nouvelle-Calédonie avaient rêvé de réaliser un film avec ce livre. Ce serait un très beau film, mais ça reste toujours en état de projet.

J’ai écrit environ huit livres qui sont des romans basés sur des faits historiques. Celui qui m’a beaucoup marqué s’intitule Nouméa… Guadalcanal, épuisé aujourd’hui, qui concerne la guerre du Pacifique entre la marine américaine et les troupes japonaises. C’est un très beau livre.

J’ai écrit aussi une trilogie, la série Pilou-Pilou, concernant l’arrivée des premiers bagnards en Nouvelle-Calédonie à la rencontre des Kanak qui étaient à l’époque cannibales. Selon une légende kanak, leurs ancêtres qui seraient restés plongés longtemps au fond de la mer devenaient blancs. Or, ces soi-disant ancêtres « blancs » les ont repoussés vers les montagnes pour leur voler des terres avec des bâtons qui tuent. À ce moment-là, c’était la guerre, le grand chef des Kanak, Ataï, voulait reprendre son pays. Mais la force coloniale a permis aux nouveaux arrivants de se maintenir sur place.

J’ai écrit cette histoire Pilou-Pilou en trois tomes. Le premier tome s’intitule Chapeau de paille qui concerne les bagnards qui se trouvent sur l’île Nou. Le deuxième tome, L’Ile de l’oubli, concerne les Kanaks prisonniers, après la grande révolte et qui se retrouvaient emprisonnées, soit sur l’île de l’oubli (c’est ainsi que les Kanak appellent aujourd’hui l’île Nou, qui était l’île du bagne) ; soit à l’île des Pins en compagnie des déportés kabyles ; soit, beaucoup plus haut encore, au nord de la Nouvelle-Calédonie, aux îles Belep. Ce deuxième tome, c’est aussi le temps du développement économique et de l’existence des métis.

Le troisième tome s’appelle La Ville aux mille collines, parce que Nouméa est très vallonnée, avec beaucoup de collines. Le troisième tome explique la vie d’aujourd’hui avec ses conflits, ses confrontations ou ses espoirs entre des Calédoniens de toutes origines qui sont venus s’installer en Nouvelle-Calédonie.

En écrivant ces trois tomes, j’ai voulu respecter un engagement moral conclu entre moi et la Nouvelle-Calédonie. La Nouvelle-Calédonie m’a si bien accueilli qu’il est de mon devoir de lui rendre hommage en écrivant une telle histoire concernant les peuples qui l’habitent aujourd’hui. Il me semble que, n’étant ni kanak, ni caldoche, c’était plus aisé pour moi décrire ces différents tomes.

J’ai encore trois ou quatre ouvrages qui dorment au fond des tiroirs. J’ai tout récemment remis un manuscrit à une maison d’édition québécoise. Il s’agit d’un livre sur l’environnement, sur la guerre contre la gabegie et la pollution. Je viens aussi de publier un livre intitulé J’aimais trop l’argent, écrit il y a 28 ans, juste après la publication de Chân Dang. C’est un livre littéraire de style « essai » que je n’ai jamais osé mélanger avec les autres livres de style « roman-historique ». Je le mets désormais à la disposition du grand public qui le recevra, je l’espère, aussi bien que Chân Dang l’a été depuis longtemps.

L’Insularité

Lorsque j’ai découvert le site Île en île, j’ai trouvé que cela répondait à une attente et me concernait directement. Étant d’origine vietnamienne, descendant d’une population qui a quand même quatre mille ans d’histoire, mais né en Nouvelle-Calédonie, je me considère plus comme un insulaire. Bref, davantage un Calédonien d’origine vietnamienne qu’un Vietnamien tout court. À partir de là, mes réactions et ma façon de voir les choses sont constamment mélangées et confondues aux principes que m’ont inculqués mes parents (le principe de la tolérance et le respect des anciens, par exemple). Mais je vis au jour le jour, selon mes principes d’insulaire. C’est la raison pour laquelle j’apprécie non seulement Île en île, mais également le Salon du Livre insulaire d’Ouessant. C’est un endroit qui rassemble tous les insulaires du monde littéraire francophone.

C’est en effet rassurant d’avoir ce sentiment d’être éparpillé à travers le monde, tout en étant si solidaires, si proches les uns des autres. On éprouve toutefois le besoin de se rassembler. C’est extraordinaire. Le SILO de Hienghène [le Salon international du livre océanien, à Poindimié], à rassemblé des auteurs principalement du Pacifique et un peu du monde francophone. Mais on ne retrouve pas cet ensemble d’éditeurs, d’auteurs, de poètes ou de poétesses qui se côtoient pendant presque une semaine comme à Ouessant pour parler de l’écriture, pour partager les espoirs ou pour faire découvrir de nouveaux talents.

En tant qu’îliens, nous nous comprenons mieux que les gens du continent. C’est quelque chose qui nous appartient en propre.

Il existe également une forte complicité qui se crée lorsque nous sortons de la Nouvelle-Calédonie, lorsque nous quittons nos rivages du Pacifique, au-delà du grand récif. Les Calédonient retrouvent alors certains gestes et termes caractéristiques du pays. Nous ne parlons plus forcément le français « pur ». Nous parlons plutôt le français caldoche. À ce moment-là, l’osmose se crée encore davantage et il y a une véritable complicité qui nous nous réchauffe le cœur.

La politique divise parfois les gens (Kanaks, Caldoches….). Il y a ceux qui sont pour, d’autre qui sont contre l’indépendance, mais une fois à l’extérieur, on ne connait plus ces clivages. Ce que l’ont sait, c’est qu’on appartient tous à une île. L’île pour nous c’est la Grande-Terre. Désormais, ça va même plus loin que ça : dans les salons littéraires extérieurs, lorsque nous rencontrons un Mauricien, voire des écrivains de la Réunion, de Tahiti ou même des Haïtiens, on partage ce même sentiment. Le sentiment de se sentir, tous, insulaires.

L’Association des Écrivains de la Nouvelle-Calédonie

L’objectif de l’Association des Écrivains de la Nouvelle-Calédonie dont je suis le président depuis quatre ans est de bien marquer notre insularité et de promouvoir la francophonie qui nous concerne tous. Pour cela, nous partageons nos expériences et nos espoirs avec d’autres associations d’outre-mer. Nous essayons de défendre malgré tout une certaine littérature, hors de l’Hexagone. Nous sommes allés parfois au Québec, en particulier au salon du livre de Montréal, dans l’espoir de rencontrer (nous, petits francophones du Pacifique) les grands francophones du Canada, afin de nous faire comprendre et de partager notre passion, tout en défendant si possible la francophonie dans le monde.

Récemment à Ouessant, le fait d’avoir posé ce problème culturel dans le cadre de la littérature insulaire, j’ai pu rencontrer des auteurs venant du Québec qui ont été sensibilisés à notre appel et qui nous ont promis de faire quelque chose afin que la francophonie dans le monde puisse mieux se comprendre et mieux se soutenir.

Les grands écrivains n’existent pas uniquement dans les grands pays. Il existe ailleurs aussi des auteurs qui mériteraient d’être connus, voire reconnus. Notre combat est de faire connaître et de faire admettre à travers le monde que les ultra-marins ont aussi la capacité de réfléchir et de produire des œuvres.

Bref, en quelque sort nous sommes des précurseurs, des combattants pour la littérature, pour la francophonie afin que le livre puisse survivre face au monde moderne d’aujourd’hui qui, de plus en plus, oublie l’importance du livre.

Il est vrai qu’en Nouvelle-Calédonie, les gens ont tendance à privilégier la pêche ou la chasse dans les montagnes ou à faire des coups de fête… Il faudrait surtout que les médias de la Nouvelle-Calédonie – comme les médias ailleurs – s’intéressent de plus près à la littérature. Cela vaut la peine, pour la connaissance, pour la littérature et pour la culture en général.


Jean Vanmai

Vanmai, Jean. « 5 Questions pour Île en île ».
Entretien, Nouméa (2009). 33 minutes. Île en île.

Mise en ligne sur YouTube le 1er juin 2013.
(Cette vidéo était également disponible sur Dailymotion, du 8 mai 2010 jusqu’au 13 octobre 2018.)
Entretien réalisé par Thomas C. Spear.
Caméra : Thomas C. Spear.
Notes de transcription : Fred Edson Lafortune.

© 2010 Île en île


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mis en ligne : 8 mai 2010 ; mis à jour : 26 octobre 2020