Flora Aurima-Devatine, 5 poèmes

Flora Aurima-Devatine lisant cinq poèmes : « À récifs frangeants », « Mémoire », « Solitude », « Te maruao » et « Voyage à travers mots et notes ».
Poésie lue par l’auteure à Paris le 25 mars 2013.
Son : Laurence Fosse ; Image et montage : Dominique Masson ; Réalisation : Estelle Castro-Koshy et Dominique Masson.

Voir aussi, filmé le même jour : Flora Aurima-Devatine, La Conscience polynésienne (« Te manava ihotupu – ‘A tae ho’i e ») et l’entretien, Flora Aurima-Devatine, 5 Questions pour Île en île.
Présentation de l’auteure : Flora Aurima-Devatine.


À récifs frangeants

Sur le récif et son platier se précipite la mer
À déferle-vague et soufflez-crevasses
À crissez-galets et gonfle-chenal !

Sur la vague dans son déferlement s’enroule la mer
À plonge-dauphin et jaillissez-écumes
À roulez-algues et sautille-héron !

Sur le rivage et dans son épanchement s’étale la mer
À creusez-crabes et cours-pagure
À sourdez-sources et battez-tambours !


Mémoire

La mémoire me revient, me surprend au détour d’un mot, d’une image, d’un parfum, d’une route,

Bruit de l’eau, ressac de la peur,
Chants des coqs, cris des oiseaux,
Ronronnement d’un moteur évoluant sur le lagon !

La mémoire surgie à l’improviste me submerge,

Mais flotte-t-elle haut dans le ciel, comme aux heures du crépuscule, la saisissant au vol, je l’intériorise à souvenirs retrouvés !

La mémoire sait que je la guette, aux heures sombres des jours d’averses et de grande crue,

Tout comme je sais qu’alors elle s’y impose en pleureuse douloureuse, narcissique m’entraînant dans sa mélancolie.

Mémoire du solitaire qui, au déclin du jour, réclame son reste, le trouve dans les entrefilets jaunes et verts émeraude au milieu des nuages gris bleus teintés de rose
Des nocturnes féeriques.

Longue mémoire bruineuse, évolutive, des nuages en procession vers leur destin en eau !

Mémoire sifflant, pépiant, susurrant à la tombée de la nuit
Mais la fraîcheur qui descend des hauteurs des terres brise la voix des gorges chaudes des chanteurs en herbe de rosée !

La mémoire des mots longtemps oubliés un instant traverse l’esprit dans sa torpeur avant de disparaître dans la mutité du sommeil qui le gagne.

Et je m’évertue à rassembler les mots qui témoigneront du voyage de l’esprit flottant vers l’imaginaire salutaire !


Solitude

Au pied de la falaise
Une maison
Un jardin-cour entretenu
Dans le jardin
Des arbres à fleurs
Par endroits
Des arbres à fruits
Les feuilles n’y sont pas
À ratisser ni à piqueter
La mer vient y mourir
Clapotis argenté
Sous l’éclat de la lune
Où l’enfance se décline
Bois flotté sur fond d’amertume
Dans l’écume des vagues.


Te maruao

J’aime ces instants fugaces à ras les flots
Où à l’ombre de la nuit la mer
S’essaie à la couleur du jour
Quand au matin du crépuscule la nuit
Se fait douceur du jour


Voyage à travers mots et notes

La musique des enfants scande et rythme mon écriture qui, joyeuse, légère, s’agite, pirouette, danse et marque le tempo,

Elle accroche ma pensée, l’entraîne dans son mouvement vif, jeune et libre de rock and roll qui sautille par petits bonds
Et se poursuit par grandes arabesques dans un twist again cadencé !

Histoire d’un voyage quittant la surface de l’eau pour s’enfoncer au-delà des plaques multicolores de coraux multiformes des ténébreuses profondeurs marines,

Entre lesquelles et au-dessus desquelles évoluent, s’agitant, en des courses et ballets incessants,
Maito, rougets, manini, poissons bleus aux mouvements furtifs,

Ballets auxquels assistent, imperturbables,

Des actinies aux couleurs variées, des oursins vana, ‘ina, occupés à viser leur proie,

Qui, de ses harpons venimeux, à l’extrémité des tentacules,
Qui de ses épines articulées balayant perpétuellement l’espace aquatique.

Voyage en musique au fond de l’eau de remémoration de tout ce qui y vit
Et s’y vit d’enseignement sur la société et d’applicable à l’humain !


Flora Aurima-DevatineFlora Aurima-Devatine lisant 5 poèmes pour Île en île. Paris, le 25 mars 2013.
Son : Laurence Fosse.
Image et montage : Dominique Masson.
Réalisation : Estelle Castro-Koshy et Dominique Masson.
Mise en ligne sur YouTube le 25 juin 2016.

Les traductions (en anglais) notées figurent en sous-titres aux films.

« À récifs frangeants », publié dans Lecture de Flora Aurima-Devatine, CD de Te Pari… à Roiron… à Barbentane, Teimiri Prod, Papeete, 2012. Traduction de Jean Anderson, Université Victoria de Wellington.

« Mémoire », publié en anglais sous le titre « Memory » in Varua Tupu, New Writing from French Polynesia, Frank Stewart, Kareva Mateata-Allain, Alexander Dale Mawyer. Manoa, a Pacific Journal 17.2 (2006): 24-29. Traduction de Jean Yamasaki Toyama, University of Hawaii.

« Solitude », publié dans Anthologie poétique-Francopolis 2008-2009, p. 29, Éditions Associatives Clapàs, Millau (France), 92 p., novembre 2009 ; et dans Lecture de Flora Aurima-Devatine, CD de Te Pari… à Roiron… à Barbentane, Teimiri Prod, Papeete, 2012. Traduction de Jean Anderson, Université Victoria de Wellington.

« Te maruao », publié dans Lecture de Flora Aurima-Devatine, CD de Te Pari… à Roiron… à Barbentane, Teimiri Prod, Papeete, 2012. Traduction de Jean Anderson, Université Victoria de Wellington.

« Voyage à travers mots et notes », publié en anglais sous le titre « Voyage through words and notes » in Varua Tupu, New Writing from French Polynesia, Frank Stewart, Kareva Mateata-Allain, Alexander Dale Mawyer. Manoa, a Pacific Journal 17.2 (2006): 24-29. Publié en français dans Lecture de Flora Aurima-Devatine, CD de Te Pari…à Roiron…à Barbentane, Teimiri Prod, Papeete, 2012. Traduction de Jean Yamasaki Toyama, University of Hawaii.


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mis en ligne : 25 juin 2016 ; mis à jour : 2 novembre 2020