Bernard Montabo, Le Palais des Jésuites


(extrait)

C’était un vaste chantier. Un énorme chantier. Dans la brame matinale encore diffuse les hommes s’agitaient, remuaient, grouillaient. Des muscles puissants roulaient sous les peaux noires, les peaux cuivrées, luisantes de sueur. Là-bas des tombereaux cahotaient dans les ornières des chemins d’accès aux fouilles, ils allaient déverser des milliers de briques, des tonnes de chaux et de sable, à proximité des grosses bailles d’eau qui les lieraient pour confectionner les mortiers et monter les bases, les fondations, les fondements, les assises de ce qui, achevé, ressemblerait plus à un palais qu’à la grande maison, le couvent, qui serait le siège d’une congrégation puissante. À coups de masses d’acier des carriers donnaient formes grossières aux blocs de murailles. D’autres tailleurs armés de ciseaux et de maillets, dans un cliquettement sonore, façonnaient les moellons. Sur la toiture de bardeaux d’un bâtiment antérieurement construit, des couvreurs s’affairaient à gestes prudents. Ce bâtiment deviendrait une des deux ailes de la grande maison, à l’ouest.

Non loin, vers le nord, presque à la frontière du chantier, la mer battait avec rythme la grève enrochée.


Lu par l’auteur, cet extrait du roman de Bernard Montabo, Le Palais des Jésuites, est le début du premier des deux romans du titre, publié pour la première fois chez Ibis Rouge Éditions (Matoury (Guyane): Ibis Rouge, 2002), page 9.

© 2002 Bernard Montabo ; © 2004 Bernard Montabo et Île en île pour l’enregistrement audio (1:23 minutes)
Enregistré à Paris au Salon du Livre le 23 mars 2004


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mis en ligne : 7 mars 2007 ; mis à jour : 27 décembre 2020